LE GRAND COM
BAT DES RATZ ET DES
GRENOUILLES.
Lisez Francoyz ce petit livre neuf
Traduict du Grec lan Cinq cens trenteneuf
On les vend a Paris en la maison de Chrestien We-
chel demourant a lescu de Basle, en la rue Sainct
Iacques, & a lenseigne du Cheval volant, en
la rue saint Iehan de Beauvays.
M.D.XL.
En voulant commancer l’oeuvre qu’ay entrepris,
O Muses, je vous pry, descendre en mes espriz,
Du hault mont Hélicon, pour mes chantz accorder,
Du fier et dur combat, que je voys recorder.
Œuvre certes de Mars : et guerres non pareilles. 5
Suppliant aux humains, de mettre en leurs oreilles,
Comment les Ratz, pareilz aux Geantz filz de terre,
On fait (ainsi qu’on dit) aux Grenouilles grant guerre :
Dont telle fut entre eulx l’occasion & source.
Vng rat, jadis, fuyant les Chatz à plaine course, 10
De grant soif alteré, vint ses barbes mouyller,
Pour la doulceur de l’eau, au prochain grenouiller :
Mais dame IOYENMARE, envyeuse et criarde,
Ceste pauvre Souriz soudainement regarde :
Si luy vint dire ainsi, a gueule bee et vuyde. 15
Qui es tu mon amy ? d’où viens tu ? qui te guide ?
Diz en la vérité : et ne me ments de rien :
Car si je te cognoys, amy, digne de bien,
Chez moy te meneray : où bien traitté seras,
Et comme hoste et amy, maint don rapporteras. 20
De moy : je suys le roy GROSGOSIER : adoré
Des grenouilles ou lac : et leur chef honnoré.
Mon père BOURBILLART, me feit soubx ces rouseaux
Par amourette joinct à la Royne des eaux,
Quant à toy, je te voy, beau, fort, preux et vaillant, 25
Pour estre ung roy, ung prince, ung duc, ung assaillant,
Si me dy, je te pry, de ton sang et lignaige.
A quoy l’autre respond : et parle en tel langaige.
Et comment mon amy ? t’enquiers tu de ma race ?
GRIPPEMYE j’ay nom : et s’appelle mon père 30
BRISEMICHE au grand cueur : FRIPPELIPPES ma mère,
Fille au roy RONGELARD : laquelle en ung bucher
M’engendra, et nourreit (comme son enfant cher)
De figues et de noix : et toute autre viande.
Mais, veu qu’entre nous deux la difference est grande, 35
Comment pourrons nous estre amys plusque ne sommes ?
Car ta vie est es eaux : et la mienne entre les hommes,
Où je mange comme eulx : et si n’espargne pas
Fouasses, eschaudez, & telz frians repaz :
Ne les tranches de lard : ny les hastemenues 40
Coiffees de leurs peaulx blanchettes & menues :
Ne le caille, qui fraiz du doulx lait s’espuroit :
Ne le bon doulx, si doulx, que dieu mesme en beuroit :
Ny tous ces bons morceaulx mys en ung pot pourry
Qu’on habille es bancquetz : & dont je suys nourry. 45
Si je m’enfuy jamais des combatz furieux :
Mais enfuys les premiers me meslant parmy eulx.
Car aussi je je ne crains (tant grand soit il) nul homme :
Ains les mords dans le lict ou mylieu de leur somme
Au doyt, par le talon, & par le gros arteil, 50
Sans leur faire aucun mal ; ne rompre leur sommeil.
Deux choses seulement en tout le monde font
Le Mylan et le Chat, qui deuil et pleur me font :
Et la Rattouere aussi : où ma mort je souspire :
Mais je crains plus le Chat, de tous aultre le pire. 55
Qui de trou en trou guette, ainsi que j’entre ou sors.
Or ne mange je point, choux, courges, ne reiffortz
Poiree ny persil. C’est vostre viandys.
Lors GROSGOSIER ryant luy respond par telz dictz.
Trop te vantes amy, pour ton ventre : En ces fanges 60
Et en la terre avons choses à veoir estrange :
Car Iuppiter nous a donné double pasture :
En terre pour saulter : en eau pour couverture.
Si savoir tu le veulx, je te porte aysement :
Monte en crouppe sur moy :& te tien seurement : 65
Si nous yrons esbattre en ma maison voisine.
Cela dict GROSGOSIER luy presente l’eschine ;
L’autre monte soudain, et saulte à la legière,
Tenant sa patte au col par doulcette manière,
Et prenoit grand plaisir à ce commancement, 70
De veoir son portefaiz nager si doulcement :
Puys çà puys là regarde au rivaige des eaux
Où conduict il estoit, entre herbes & rouseaux.
Mais se sentant couvert de l’eau sans ressortir,
Moult se fasche, & gemist : et son vain repentir 75
Accuse tendrement : poil et barbe s’arrache
En serrant des talons, cil qui ainsi le fache.
Et desirant la terre, il souffre dure estrainte,
Par la necessité d’une si froide crainte.
Puys estendant la queuhe ainsi qu’un avyron, 80
La trayne par le lac & fanges d’environ :
Priant aux dieux qu’à terre il puisse retourner :
Mais l’hoste le faisoit de haut en bas tourner :
Dont GRIPPEMYE las de telz durs accidentz,
S’escriant, sourissoit telz motz entre ses dents. 85
Le thoreau qui jadiz porta dessus sa croppe
En Candie, le faiz de ses amours, Europe,
Ne la traittoit ainsi, que fait moy la Grenouille :
Qui me traynant chez soy ainsi me baigne & mouylle :
Eslevant mon corps palle en son eau lymonneuse. 90
Ce dict, Il voit de loing L’hydre serpent hideuse
Qui se haussoit le col sur le lac endroit deulx
(Spectacle horrible à l’un & à l’autre des deux)
Pour la crainte duquel, GROSGOSIER ne pensant
Plus à son compaignon qu’il alloit là laissant 95
Se coule au fond du lac, pour se saulver de mort.
GRIPPEMYE laisse et plus qu’à demy mort
Tumbe à l’envers dans l’eau : & faisant souspirs mains
Grinsoit des dents très fort : & estraignoit les mains
Si entroit dessouz l’eau, bien souvent : puis sortoit 100
Dessus en talonnant : mais le poix l’emportoit
Tousjours au fonds : et la mourant il deit ainsi.
GROSGOSIER les haultz dieux entendront tout cecy :
Et comment tu as fait de mon corps ce naufrage :
Meschant, tu n’estois point plus gentil personnage 105
Que moy, pour bien combattre, ou luytter, na la course :
Mais, par grant trahison me faiz mourir, & pour ce
Dieu qui tout voit, fera que le comperras :
Et des Souriz l’armée éviter ne pourras.
Parlant ainsi le Rat, l’ame du corps sortoit : 110
Mais LEICHEPLAT, qui lors au mol rivage estoit
Le court dire aux Souriz : qui très fort s’en doulurent :
Si font à son de trompe assembler pauvre et riche,
Le lendemain matin, au palais BRISEMICHE,
Père du trespassé : Duquel le pauvre corps 115
Noyé nageoit ou lac, à l’envers loing des bortz.
Estans doncq arrivez : les ratz au poinct du jour,
BRISEMICHE marry, sans faire long sejour,
Se dressant le permier parla ainsi à tous :
Or chers amys, encor que seul soye entre vous 120
Qui porte tout le faiz de l’injure importune,
Si est elle pourtant à vous & moy commune.
Bien suys je (voyre moy) entre tous langoureux
D’avoir ainsi perdu trois enfans malheureux :
Le Chat print le premier au sortir d’un pertuys 125
Et le tua de fait en le grippant : Depuys
La malice des gens cruelle, & sans matière,
A fait l’autre mourir dedans une rattière :
Le tiers (qui me fut cher, & à sa mère aussi)
Le traitre GROSGOSIER a fait mourir ainsi. 130
Sus sus, armons nous doncq, tous de diverse sorte :
Sortons sur eulx arméz, & usons de main forte.
Ayant dit telz propos, chascun deux court aux armes :
Et les atournoit Mars le grant dieu des alarmes.
Si meirent tout premier sur leurs jambes, des greves 135
Quilz avoient fait la nuyct de peleures de febves,
Leurs cuyraces estoient de fort rouseau, caché
Du cuyr d’un chat puant, qu’ilz avoient escorché :
Et furent leurs boucliers de bonne & dure trampe,
Faitz par grant industrie & art, de culz de lampe : 140
Leur lance (œuvre de Mars) fut d’une longue aiguylle,
Et leur armet forgé d’une forte coquille
De noix. Voyla comment Ratz & Souris s’armèrent :
Dont les nouvelles tost çà & là se semèrent :
Tant que advertiz de ce les seigneurs de l’estang, 145
Assemblent en ung lieu leur conseil & leur sang :
Et eulx voulans savoir d’où sourdoit tel tripot,
Voicy venir soudain le hérault GRIMPENPOT,
(Filz de PERCEFROMAIGE) annuncer la bataille :
En leur disant ainsi.
O laide Grenouaille, 150
Les Ratz vous menaceans, vous font par moy savoir
La guerre ouverte. Or doncq faictes d’armes devoir :
D’autant que GRIPPEMIE occis par GROSGOSIER.
L’on voit mort estendu dans l’eau soubz ung osier :
Mais venez au combat, toutes quant que vous estez 155
Et ny faillissez pas, en faisant là des bestes.
Cela dict : GRYMPENPOT soudain se disparut.
Et la dure nouvelle es oreilles courut
De tout le grenouilliz : Qui furent en soucy,
Accusans GROSGOSIER : lequel s’excuse ainsi 160
Amys, ce n’est point moy qui occeit GRIPPEMYE :
Et ne la vey jamais morte ny endormye.
Peult estre qu’elle est cheute en se maretz flotant :
Et cy dedans noyée, à nager s’esbatant :
Croiez m’en qui est vray : puis toute celle trouppe 165
M’en vient icy charger : moy qui n’en suys en coulpe :
Mais, sus, remuons nous : voions qu’il est de faire.
Pour ces Ratz cauteleux assominer & deffaire.
Quant à moy, nous devons pour le myeulx (ce me semble)
Nous présenter arméz sur le rivage ensemble : 170
Et les attendre là de pied quoy sur le bort.
Car quant ilz marcheront pour faire aucun effort,
Les poussans seulement ung peu du hault en bas,
Noyer les y ferons, sans avoir grans debatz :
Entendu mesmement quilz ne savent nager. 175
Puys ferons des Ratz mortz ung trophée ériger.
Ce disant GROSGOSIER d’armes ils les atourne :
Et des feuilles de maulve autour des jambes tourne :
Si leur coeuvre le corps de brigandines, faittes
Des estenduz feuillars de verdoiantes bètes : 180
Feuilles de choulz cabuz servirent de bouclers :
Leurs lances sont de joncz ayguz longs & bien clairs :
Puys prenent leurs armetz : & se coeuvrent la teste
De coque de lymas. Voyla l’armee preste :
Qui ses lances brisoit par esbat ou rivage : 185
Et celle n’y avoit, qui n’eust très bon couraige.
Lors Iuppiter appelle en son ciel tous les dieux.
Monstrant celle grant guerre entre gens furieux :
Puissantz de force & nombre : & d’armeure encores :
Comme dire on pourroit les Geants et Centores, 190
Marchantz l’un contre l’autre en mortelle bataille.
Si s’enquiert Iuppiter aux dieux (comme on se raille)
Qui veult aider ceulx là, & secourir ceulx cy.
Et parlant à Pallas, il luy a dit ainsi.
Fille, n’yras tu pas les Souriz secourir : 195
Que nous voions tousjours par ton temple courir
Et sauteller de joye à l’odeur des viandes
Que pour le sacrifice on porte à tes offrandes ?
A quoy respond Pallas.
Certes très hault,
Si tout devoit perir, d’elles il ne me chault, 200
Ilz m’ont fait trop d’ennuys, mes chappeaulx destruysant
Et mes lampes par l’huyle en humer espuysant :
Et qui pis est (& dont je suys plus offensée)
Ma saincte guymple ilz ont en trop de lieux percée :
oeuvre de fyne traime, à ma peine tyssu : 205
Dont l’estain delye est de ma main yssu :
Mais le tessier de l’oeuvre emprunte, veult sa tasche :
Et je n’ay plus de quoy l’en payer : qui me fasche.
Si ne veuil pourtant faire aux Grenouilles ayde :
Car elles n’ont l’esprit arresté ne solide. 210
Ains moy m’en retournant quelque foys d’une guerre,
Moy lasse & travaillée, estant au repos querre,
Il ne me fut permis par leur tumulte & bruyt,
Cligner seulement l’oeil, jusques après la nuyct,
Que le coq s’escria, moy malade de teste. 215
Or les laissons donc la demener leur tempeste :
De peur qu’auculn de nous soit blessé de leurs traitz :
Car ilz sont ja à mesme : & combattent de pres,
Jurast dieu du contraire. Et pource esbattons nous
A regarder du ciel le combat et les coupz. 220
Comme Pallas leur dit, le feit ung chascun Dieu :
Et s’assemblèrent tous pour veoir d’un mesme lieu.
Lors trompettes donnans d’un fier estour les signes,
Vont haultement sonner es clarons & buccines :
Cantharides, cousins, & mousches, à grans pompes, 225
Et papillons, sonnoient dedans leurs longues trompes
Tant & par tel effort, que tout en resona :
Et mesmes Iuppiter de son hault ciel tonna.
BRAIHAULT doncq les premier choqua du coup de lance
Ung des avantcoureurs LESCHEQUEUE à la pance : 230
Qui cheut de bouche à dents, ce en plaine poussière
Se barbouilla le poil & la perruque entière :
AUTROUCOURT d’autre part, lancea sa javeline
Encontre BOURBILLART, & sa grise poictrine
La hampe qui fut grosse (ainsi comme une poultre) 235
Et le Rat maistre & brusc faulsa sa grand busse oultre,
Tant que l’autre cheut mort de ce grand coup à terre :
Et l’ame s’en vola, BETELIN lors grand erre
Frappe au cœur GRIMPENPOT, & tout mort l’estendit.
MASCHEPAIN par les flans CAQUETON pourfendit : 240
Qui mort cheut à l’envers. Ce voyant IOYENMARE,
La meule d’un moulin haulsa (sans dire guare)
Au col de MASCHEPAIN : qui tout du coup estourdy
Bruncha comme ung aveugle, ou comme ung estourdy.
LEISCHEQUEUHE, qui lors IOYENMARE guetta, 245
La lance par le corps sans faillir luy bouta.
MASCHEFEUILLE voyant de cest assault le bruyt,
Saulte du hault en bas : & soubz les eaux s’en fuyt :
Où la mort toutesfoys, il ne peult eschapper :
Car LAICHEQUEUHE, après si fort le vient frapper, 250
Qu’en mourant il taignit le lac de son gros sang :
Puis apparut enflé pres des borz de l’estang.
Lors ESTAIGNART venant droit [vers] PERCEFROMAIGE
Le deffeit promptement tout auprès du rivage.
Mais la ROUSIERE eut peur de grand CREUSEJAMBON : 255
Si se retire au lac jettant son bouclier bon.
La RIVIERE au contraire, en frappant ce grand Roy
MANGELARD, d’un caillou le meit en tel desroy,
Que du coup, le cerveau par les naseaux sortoit :
Et la terre du sang toute converte estoit. 260
Mais aussi LEICHEPLAT d’un coup de lance embroche
BOURBEASSISE, le preux chevalier, sans reproche.
Dequoy BRISEPOREAU offensé tire & happe
SUILEVENT par le pied : & tant le bat & frappe,
Qu’au plus profond du lac l’estouffe & fait mourir. 265
Lors voyant RIFFLEMYE ainsi ses gens périr ;
En prend dure vengeance : & BOURBELIER transperse,
La frappant pardevant, si tombe à la renverse :
L’esprit va es enfers : sur l’heure MARCHEBOULE
Plein poing de fange jette aux yeulx & à la joue 270
De RIFFLEMYE : auquel presque elle osta la veue.
L’autre de ce marry une pierre luy rue
Qui trouva sur le champ : dont la jambe il luy froisse
Et l’estend à l’envers, tout plat, en dure angoisse,
Sur le poulsier : de quoy CROAQUIN se vengea 275
Car ledict RIFFLEMYE à tel point il rengea,
Que d’un coup qu’il luy donne au travers de son ventre
Son dard de jonc aigu, tout entier dedans entre :
Tellement qu’au tirer les boyaulx en sortirent :
Et sur la terre espars, en plein camp sestendirent. 280
Quoy voyant RIFFLETOUT, doubteux sur le rivaige,
Se tirent de la presse : & prenant avantaige,
Saulte dans ung fossé : pour fuyr le danger.
Mais BRISEMICHE, vient GROSGOSIER l’aidangier :
Lequel blecé au pied, dedans le lac se fiche, 285
A demy vif saulvé : & voyant BRISEMICHE
Qu’il n’estoit mort encore aigrement luy court sus,
Désirant l’achever : si n’eust esté PRASSYS
DESPOREAULX : qui darda son bois de jonc aigu.
Contre les assaillans, & brisa ung escu, 290
Sans oultre le percer : si que la dure poincte
Demoura là dedans bien attachée & joincte.
Or fut entre les Ratz ung jouvenceau vaillant
Nommé GRIPPELOPIN : qui de près assaillant
Ressembloit ung droit Mars : et fut filz très aimé 295
Du noble GUETTEPAIN sur tous Ratz renommé.
Lequel GRIPPELOPIN seul, en toute presse :
Combattoit hardiement d’une grande prouesse
Si se meit pres du lac, en hault lieu separé :
Où il se vante, & montre au combat preparé. 300
Pour faire toutes (seul) les Grenouilles mourir.
Ce que certes il eust fait pour coigner & ferir ;
Car il estoit puissant : Mais le dieu Iuppiter,
Père d’hommes & dieux y voulant éviter,
Aiant d’elles pitié, deit en branlant le chef. 305
O dieux : certes je voy, d’icy, ung grand meschef :
GRIPPELOPIN m’estonne, assez sur ces estangz
Quand il entreprend seul les bestes y estans
Deffaire & ruyner : Mais envoyons bien tost,
Pallas & Mars l’horrible, encontre de cest ost : 310
Pour chasser du combat, le fort GRIPPELOPIN :
Encore qu’il soit roide & ferme comme ung pin.
Cela dict, Mars respond, à Iuppiter ainsi.
Certes, hault Iuppiter, Pallas, ne moy aussi,
Ne saurions pas saulver, les Grenouilles de mort. 315
Mais, fault qu’y allions tous, pour leur donner confort :
Ou bien fay fouldroyer ton dard espouvantable,
Dont tu deffeiz jadiz, la trouppe abhominable,
Des Titans hardiz, par tes vertuz celestes :
Dont tu deffeiz jadiz, tous ces Geantz agrestes 320
Foibles, oultrecuydéz : & leur fole entreprise.
Ainsi s’excusoit Mars : & Iuppiter advise
De croire son conseil : si tonna haultement :
Faisant branler le ciel, universelement.
Puys envoya l’esclair aussi dru comme pouldre : 325
Et feit descendre à coup son treshorrible fouldre :
Dont il estonna tant Grenouilles et Souriz,
Qu’ilz pensoient estre tous mortz, deffaitz, & périz,
Mais pourtant la fureur des Ratz ne s’abbaissoit :
Ainsi de fendre & fouler, Grenouilles ne cessoit : 330
Si dieu n’eust eu mercy d’elles, tout de ce cours
Leur envoyant très prompt & au besoing secours.
Lequel fut de souldartz, tout d’enclumes couvertz :
Qui patte & marches, ont de tort et de travers,
Pleins d’escailles & doz, reluysans sur l’eschine, 335
Rougeastres, begueyantz, voyantz de la poitrine,
A deux testes, huit piedz, & griffes difforméz,
Qui serrent sans serrer : & cancres sont nomméz
Lesquelz venus au lieu où estoit le combat
Chascun d’entre eulx, plusieurs des autres, en abat. 340
Car contre lesdictz Ratz de furie ilz marchoient :
Et avecques leurs dentz, mains piedz queuhe, tranchoient
Tant que les dardz des Ratz contre leurs peaulx plièrent
Dont eulx veincuz, en soy (las) plus ne se fièrent.
Ains s’en fuyrent lors que le souleil couchant 345
Fyneit la guerre et jour par la nuyct approchant.
FIN
LE TRANSLATEUR AUX
LECTEURS.
Mieulx ne se peult ceste fable subtile
Appropier, qu’aux oeuvres naturelles :
Cest le vray sens : et si très utile
A contempler les choses eternelles,
Vous y voyez les diables & les dieux,
Le ciel, le monde, enfer, & choses telles,
Tirez au vif, si bien quil n’est rien mieulx.
RATZ.
Fix‹ rpaj
Micarum raptor Grippemye.
Troj‹ rtaw
Vorans panem Brismiche.
Leikom® lh
A lambendis maxillis Frippelippes Royne.
PtergvjÈ rtaj
Pernas rodens Rongelard Roy.
LeixopÛ naj
A lambendis paropsidibus Leicheplat.
EmbasÛ xutrow
Irrepens in ollis Grimpenpot.
Leik° nor
Lambens caudam Leichequeuhe.
Troglodè taw
Intrans rimas Autroucourt.
Artof‹ gow
Manducans panem Maschepain.
turñ glufow
Cavator caseorum Percefromaige.
Pternñ glufow
Pernae cavator Creuseiambon.
Pternof‹ gow
Pernae comestor Mangelard Roy.
KniosodiÇ ktew
Nidorem insequens Suylevent.
Fix‹ rpaj
Micas absumens Rifflemye.
Sitof‹ gow
Cibos absumens Riffletout.
Merid‹ rpaj
Particularum raptor Grippelopin.
Artepiboulow
Qui insidiatur pani Guettepain.
GRENOUILLES
Limnñ xariw
Gaudens palude Ioyenmare.
FusÛ gnayow
Inflatis maxillis Grosgosier.
Phleæ w
Lutum Bourbillart.
sqibñ aw
Alte clamans Brayhault.
seutlaÝ ow
A beta Betelin.
polæ fvnow
Multisonus Caqueton.
Krambof‹ gow
Comedens caules Maschefeuille.
limn® siow
Manens in stagno Estaignart.
KalamÛ nyiow
Manens in arundineto La Rousiere.
borborokoÛ thw
Iacens in coeno Bourbeassise.
idrox‹ riw
Gaudens aquis La Ryviere.
praosof‹ gow
A comedendo porro Briseporreau.
phlioæ siow
A luto vel coeno Bourbelier.
phlob‹ thw
Per lutum incedens Marcheboue.
krangasÛ dhw
A clamore Croaquin.
praoneè w
A porris DesPorreaulx.