L'art poëctique de Quinte Horace Flacce
mis en vers Français
par
I. P. D. M.
AUX PISONS.
Si quelque Peintre avoit fait le portraict
D'un chef humain, puis en changeant de trait
Faisoit le col d'un cheval, & l'image
Estoit semé de different plumage,
Et composé de membres amassez 5
De toutes parts, lourdement compassez,
Tant que le haut par estrange façon
Fut femme belle, & le bas un poisson :
Amis venuz ce tableau regarder,
Pourriez vous bien de rire vous garder? 10
Croiez, Pisons, qu'à cette portraiture
Sera du tout semblable l'écriture
Aiant le stile & ordre poetique,
Ni plus ni moins qu'un songe fantastique
D'un patient, si qu'en aucune sorte 15
Ni pié ni teste se rapporte.
Peintres tousjours, & Poetes ensemble
Feignent et font tout ce que bon leur semble :
Il est bien vrai, & d'une telle excuse
User voulons, & que chacun en use : 20
Mais non pourtant que la doulceur du miel
Soit assemblee auec l'aigreur du fiel,
Ni les serpens avec les oiseletz,
Les tigres fiers avec les aigneletz.
A un exorde issant de haute vois, 25
Et qui promet grans choses, maintes fois
Sont attachez maintz ornemens de lustre
Pour faire l'euvre apparoire plus illustre,
Quand on decrit la forest decoree,
Avec l'autel de Diane honoree, 30
Ou le circuit du ruisseau ondoiant
Faisant son bruit par le pré verdoiant,
Ou bien le Rhin gracieux & doux fleuve,
Ou l'arc en ciel qu'on voit avant qu'il pleuve,
Mais quoi? Cela ici n'est pertinent, 35
Et dirait lon de toi incontinent,
Tu es celui qui sçayz peindre un Ciprès :
A quel propos, si un marchant, apres [p.339]
Estre eschapé de mer tout eperdu,
Ou son navire & son bien a perdu, 40
Veut estre peint pour argent avancé?
Un vaisseau large & long est commencé,
Donques pourquoi tant que la roue court,
S'en fait il un plus etroit & plus court?
A brief finir, il faut que tout Poeme 45
Suive par tout un simple & egal theme.
Pour la plus part, nous qui suivons l'affaire
De poesie, en guise de bien faire
Sommes deceuz : Breveté je procure,
Ma breveté rend la matiere obscure. 50
Qui trop se plaist en delicat ouvrage,
En lui defaut la force et le courage :
Celui qui est de hauz cas professeur,
Devient enflé. Qui veut estre trop seur,
Et qui craint trop de la mer les combatz, 55
Il glisse en terre & demeure trop bas :
Celui qui veut deguiser amplement
Chose qui est une tout simplement,
Veut le Dauphin aux bois acoutumer,
Et le Sanglier faire vivre en la mer. 60
L'esprit humain en erreur est induit
En l'evitant, s'il n'est par art conduit.
Un febvre bas prés le jeu Aemilin
Sçaura tailler les ongles en aerin,
Et les cheveux imiter vivement : 65
Mais il sera en son achevement
Mal fortuné, si, comme il est metier,
Rendre ne peut l'ouvrage tout entier.
Si je faisoi quelque euvre en mon endroit,
Estre semblable à lui, ne me chaudroit 70
Non plus qu'avoir le nez contrefait, voire
Aiant les iëux & la perruque noire.
Vous escrivains, prenez un argument
A vous egal, & pensez longuement
Ce que pourrez, ce que ne pourrez point : 75
Qui son suget aura choisi a point
Selon sa force, il n'aura nul defaut
De motz exquis, ni d'ordre tel qu'il faut.
Toute la force & grace en disposant,
Ou je m'abuse, est que le composant 80
Die en l'instant ce qu'en l'instant doit dire,
Et plusieurs poincts il reserve à escrire
En temps & lieu, & et qu'il sçache accepter
Tel incident, & un tel regretter. [p.340]
Or si tu veux nouveaux motz faire naistre, 85
Il te convient bien modeste et fin estre.
Loué seras si d'un mot de saison
Tu en fais un par bonne liaison
Qui soit nouveau. S'il faut que tu reveles
Par nouveaux motz choses toutes nouvelles, 90
Feindre pourras des motz & termes maints
Non entendus par les Cethèges ceints
Et te sera permise & approuvee
La nouveauté sobrement controuvee.
Les motz nouveauz & n'agueres tissuz 95
Seront en prix, pourveu qu'ilz soient issuz
Des motz Grejois, sans trop les deguizer.
Mais en ceci peut on favorizer
Caecile & Plaute, & qu'un pareil credit
Soit à Virgile et a Vare interdit? 100
Et si je puis feindre comme les vieux,
Pourquoi est on dessus moi envieux,
Veu que Caton & Ennius ont fait
Nostre Latin plus riche et plus parfait,
Et nouveaux motz sur les choses ont mis? 105
Tousjourz sera & a esté permis
Produire vn nom qui tout neuf represente
Le propre trait de la mode presente :
Ni plus ni moins qu'un bois se renouvelle,
Par chacun an de verdure nouvelle 110
Aiant jetté tout son premier fueillage,
Ainsi des motz se passe le vieil age,
Et sont en fleurs les vocables recens,
Ainsi que sont jeunes adolescens.
Nous & nos faitz sommes pour final terme 115
A mort vouez. Soit qu'au rivage ferme
Neptun receu chasse des naux les vents,
Euvre de roi : ou sterile lon temps
Le lac Pontin apte aux rames marines,
Ore nourrisse & les villes voisines, 120
Et soit souvent du pesant soc pressé :
Soit que le Tibre ait ailleure traversé
Laissant le cours aux semences nuisible,
Et en ait pris un autre plus duisible :
Bref des mortels les faictz doivent perir : 125
Ni mesme aussi les motz tousjours florir,
Encor' seront les vocables repris
Qui ont esté pieça mis à mepris :
Et ceux aussi ausquels l'honneur on donne,
S'aboliront si l'vsage l'ordonne, 130 [p.341]
Vsage vif, souz lequel git la forme,
De tout parler, la vertu & la norme.
Montré nous a Homere par quel metre
Et en quel stile on doit les gestes mettre
Des rois puissants, & prouesses hautaines 135
Mises à chef par les preux capitaines.
Les verz conjoinz par inegal compas
Dire on souloit sur le dernier trepas
Au temps premier, puis les joieuses choses,
I ont esté semblablement encloses : 140
Mais toutesfois qui a esté l'auteur
De l'Elegie & premier inventeur,
Grammairiens en sont en procedure,
Et souz le iuge encor' leur procez dure.
Archilocq' mit par courroux furieux 145
Son propre Iambe en vers injurieux.
De cetui pié vsa la Comedie,
Et mesmement la haute Tragedie,
Pource qu'il est au mutuel parler
Fort conuenable, & qu'il meine par l'air 150
Plus grand reson que le peuple bruitif,
Et est des faictz communs executif.
Dieux, Demidieux et Athlètes puissans,
Et le combat des chevaux hannissans,
Et les banquetz & plaisirz veneriques 155
Comprint la Muse es premiers vers Liriques.
Si je ne puis garder les divers signes
De chacun fait, & les couleurs insignes
En escrivant, pourquoi suis je nommé
Monsieur le Poete, et pour tel renommé? 160
Point ne requiert la matiere Comique
Estre traittee en vn stile tragique :
Aussi n'est bon que faitz de trouble on die
En simples vers et bons en Comedie.
Brief chacun fait selon sa difference 165
Tiene son lieu en propre coherence.
Ce nonobstant si voit on quelquefois
Que Comedie un peu hausse sa voix
Et que Chremes forsenant de furie
Tanse criard d'une levre bouffie : 170
Et le tragique en ses plaintifs debats
Vse de motz assez humbles et bas.
Or si Telephe & Pelee ebahiz,
Pauvres tous deux, & chassez du païs
Veulent navrer les cueurs & pensemens 175
Des spectateurs par leurs gemissemens,
Loing de leur bouche ils ietteront l'ampoulle, [p.342]
Et les longz mots qu'une grand queue roulle.
Ce n'est assez qu'vn Poeme soit luisant
En mots exquis, s’il n’est doux & plaisant, 180
Si bien qu'il puisse emouvoir le desir
De l'auditeur à son gré & plaisir,
Les escoutans sont provoquez à ris
En voiant rire & se monstrent marris
Du deuil d'autrui, si tu veux que je pleure, 185
Premier te faut lamenter, & à l'heure
Bien me poindra la douleur qui te point.
Toi, ô Telephe, & toi Ô Pelee. a point
Si tu ne dis ce qu'on te baille à dire,
Ie dormirai, ou me prendrai a rire. 190
A un maintien de tristesse & souci
Convient propos plaintif & adoulci.
A l'homme plein de depit courageux
Faut un parler terrible & outrageux,
A l'homme gai motz joieux & lascifz, 195
A l'homme vieil propoz meurs & rassiz.
Car touz obiects des cas exterieurs
Nous met nature es sens interieurs
Premierement : plaisir elle nous cause,
Ou de courroux elle nous donne cause, 200
Ou quelque fois d'vn crevecueur amer,
Elle nous fait jusqu'en terre pamer :
Et le secret de la pensee alors
Par le moien de la langue met hors.
Si le propos de celui qui dira 205
Ne lui convient, tout chacun s'en rira
Petitz & grands. Le rolle d'un Dieu maistre
Ne doit pareil à un Demidieu estre
Ni le vieillard desja meur & prudent
Au jeune convoiteux & ardent, 210
Ni la matrone opulente & honneste
A la nourrice a tout service preste :
Ni un marchand qui pour gaing partout erre,
Au paisan qui laboure la terre,
Ni un de Colche à un Assyrean, 215
Un né à Thebe au natif Argean.
Au bruit commun il faut que tu te formes,
Ou feignes cas ensemble tous conformes
En escriuant. s'il aduient qu'au narré
Tu vueilles mettre un Achille honoré : 220
Fai le hardi, ireux, inexorable,
Impetueux, apre, & insuperable,
A toutes loix niant obeissance,
Tout vsvrpant par armes & puissance : [p.343]
Medee soit cruelle & furibonde, 225
Inon plaintive, & Ion vagabonde,
Sans loiauté soit descrit Ixion,
Oreste plein de triste affliction.
Mais si tu veux chose incongnue adduire,
Et un nouveau personnage introduire, 230
Garder lui doiz jusques au bout du rolle
Pareil maintien, & semblable parolle :
Difficile est dire de son esprit
Ce que par autres onques ne fut ecrit :
Et plus seur est de prendre pour ton theme 235
Et ton guidon l'Homerique poëme,
Que d'inventer de ton propre cerveau
Quelque suget incongnu & nouveau.
Un argument commun & regulier
Sera trouvé propre & particulier, 240
Si trop tu n'es arresté & suget
A un circuit trop ample & trop abject,
Ni mot pour mot, en traducteur fidelle,
Rendras les vers de ton suivi modelle
Ni entreras en vn lieu si estroit, 245
Qu'apres saillir ne puisses du destroit
Voulant sauver une honteuse crainte,
Et de ton euvre une loi trop contreinte :
Et ne feras vn exorde si vain
Comme jadis le cyclique escrivain, 250
DU ROI PRIAM LA FORTUNE ECRIRAI,
ET LES COMBATS RENOMMEZ CHANTERAI.
Qu'apportera ce promettant si rogue
Pour accomplir ce glorieux prologue?
Une montaigne enceinte apparoitra, 255
Vne soury ridicule naitra.
Trop mieux a dit ce poëte sçavant,
Qui sans propos ne met rien en avant,
Muse di moi l'homme plein d'entreprise,
Lequel apres que Troie a eté prise 260
A eprouvé maintes diversitez
D'hommes vivans : & païs & citez.
Donner il veut non de clairté fumee,
Ains de fumée une flamme allumee,
Pour mettre apres en miraculeux stile 265
Un Antiphat, un Charybde, une Scylle,
Et un Cyclop. ni des le fée jour
De Meleagre ourdir va le retour
De Diomede : ou deux oeufs recenser,
Pour des Troiens la guerre commencer. 270 [p.344]
Tousjours il tend à finir son propos,
Et au milieu rend l'auditeur dispos
A concevoir les choses precedentes
Qu'omises a comme bien evidentes :
Et ce qu'il voit ne pouvoir prendre teint 275
Et n'ecriuant, aucunement n'atteint :
Et tellement ses fictions pallie,
Ainsi le vrai avec le faux meslie,
Que le milieu du premier ne differe,
Que la fin au milieu se refere. 280
En cet endroit sçais tu que je requiers,
Et tout le peuple avec moi? si tu quiers
Iusqu'a la fin avoir los & faveur,
Et que l'on trouve en tes euvres saveur,
Le naturel te convient regarder 285
De chacun age, & entier le garder,
Et exprimer les gestes bien seans
Aux changemens des natures & ans.
L'enfant petit qui desja sçait parler,
Et qui seulet fermement peut aller, 290
Est de jouer à ses pareilz bien aise :
Il se courrousse, & soudain se rappaise,
Et à tous coups change d'affection.
L'adolescent hors la correction
Du pedagogue, aime chevaux & chasse, 295
Et au soleil sus l'herbe se delasse,
Facilement à malice s'applicque,
Et rudement aux remonstrans replicque,
Est bien a tard de son bien provident,
Prodigue, fier, convoiteux, & ardent, 300
Tost ennuié de son premier plaisir.
L'age viril change, & met son desir
A bien avoir, & amis meriter,
Craint son honneur, & sçait bien eviter
Ce que changer conviendroit parapres. 305
Plusieurs ennuiz environnent de pres
L'homme vieillard : car etant plantureux
En biens aquis, tant il est malheureux,
Il les epargne, & user il n'en ose,
Il est timide & froid en toute chose, 310
Grand delaieur, long d'espoir, imbecille,
Et curieux du futur, difficile,
Plein de chagrin, louant le temps premier
Qu'il etoit jeune, & censeur coutumier
Des jeunes gens. Les premiers ans qui sortent, 315
Plusieurs bontez avec eux nous apportent, [p.345]
Plusieurs aussi emportent en allant.
Pource il ne faut qu'un jeu homme parlant
En son maintien vn vieillard represente,
Ni qu'un enfant son homme viril sente. 320
Tousjours auront egard au personnage
Qui est devisant & propre à chacun age.
En plein spectacle on traitte quelque chose,
Ou desja faite au peuple elle s’expose :
Ce qu' on entend seulement par l'aureille, 325
Aux cueurs ne fait emotion pareille
Comme s'il fut de l'oeil ferme apperceu,
Et par effet du spectateur receu :
Mais on ne doit sur l'eschaffaud montrer
Ce qui se doit au dedens acoutrer, 330
Et plusieurs cas faut oster hors des jeux
Qui se diront de bouche beaucoup mieux.
Il ne faut pas que d'une main pointue
Ses filz Medee aux yeux du peuple tue,
Non plus aussi qu'Atrée l'inhumain, 335
Cuise les filz de son frere germain,
Ou bien que Progne en oiseau de jargon
Sort transmuée, ou Cadme en un Dragon :
Tout ce qu'aux yeux me montres en ce point,
Je le dedeigne, & si ne le croi point. 340
La fable aussi qui veut estre louee,
Et de rechef presentée & jouée,
Cinq actes doit, ni plus ni moins, avoir,
Et Dieu aucun parlant on n'i doit voir,
Sinon qu'un point bien doutteux le requiere : 345
Et i parler un quatrieme ne quiere,
Le Chore soit du parti de l'acteur
Et de vertu virile protecteur,
Et ne propose entre les actes rien
Qui ne profite & conviene tresbien : 350
Departe aux bons faveur perpetuelle,
Et aux amis amitié mutuelle :
Des courroussez refreigne la fureur,
Et aime ceux qui ont vice en horreur :
Voise louant frugalité de table 355
Voise louant justice profitable
Civiles loix, Paix qui tient tout couvert :
En seureté : tienne un secret couvert :
Prie les Dieux qu'aux affligez fortune
Propice soit, & aux fiers importune. 360
Garni n'estoit de cuivre le hautbois
Comme à present, & n'imitoit la vois [P.346]
De la trompette, ainçois grelle & uni
Et de pertuis n'etoit gueres muni
De bon accord pour assister aux chores, 365
Et pour remplir les sieges, qui encores
N'etoint epais du reson qu'il jettoit :
Car pour le temps le peuple encor etoit
De petit nombre, honeste, & sans envie,
Continent, chaste, & de modeste vie : 370
Mais quand il vint par frequente victoire
A augmenter le petit territoire
Et la cité, & sans loi sur le jour
Boire d'autant aux festes de sejour,
Lors creut aussi la licence hardie, 375
De la mesure & de la melodie :
Car puis le temps qu'avecques les bourgeois
Furent mellez agrestes villageois
Abbandonnanz charrues & labours,
Comment ne fut tout allé au rebours, 380
Etant assis gens qui ne valent rien,
Confusement avec les gens de bien?
Et de la vint que le musicien
Gestes de cors avec l'art ancien,
Et volupté superflue mella, 385
Se pourmenant par le jeu ca & la.
De la aussi s'eleverent les sons
Des instruments en plus hautes chansons :
Consequemment l'audacieuse langue
User voulut de nouvelle harangue : 390
Philosophie aussi qui est fontaine
De bonne vie, & notice certaine
Des cas futurs, & des secretz miracles
Devint semblable aux Delphiques oracles.
L'auteur premier qui fit Tragiques vers, 395
Montra depuis Satyre decouvers,
Et si voulut avec l'apre matiere,
Gardant toujours la grauité entiere,
Entremeller propos facecieux,
Pour amuser par attraiz gracieux 400
Et tous nouveauz les spectateurs delivres
Du sacrifice, & desia demiz ivres,
Sans nulle loi en leurs plaisirs raviz.
Mais il fauldra avoir certain avis
En produisant les Satyres mocquars 405
Et reprenans, en joignant les brocars
Aux graves faitz, qu'un Dieu par nous montré
Ou demidieu, qu'on a veu accoutré [p.347]
Par ci devant en roial vestement
On n'oie apres parler petitement : 410
Et tragedie, ou propres ne sont pas
Les vers legerz, & de style trop bas,
En evitant la terre qui est basse
Par sus les vens & les nues ne passe :
Comme s'on voit une matrone honneste 415
Entrer en danse à quelque jour de feste,
Estre devra plus modeste à vrai dire
Que ne seroit un petulant Satyre.
Quand toutesfois Satyres j'escrirai,
Agrestes motz seulement n'elirai 420
Ny affectez en leur proprieté,
Aussi n'aurai si grande anxieté
De m'eslongner hors des Tragiques rengs,
Que point ne soient en parler differens
Dave le serf, & la fine Pithie 425
Qui d'un talent sceut esmoucher hardie
Le vieil Simon, ou Silene le gent,
Du dieu Bacchus nourricier & regent.
Une notoire & commune sentence
Ie choisirai, si bien que chacun pense 430
En faire autant, mais qu'à l'essai il prene
Peine tresgrande, & en vain entreprene
D'en faire autant. Tant vertueuse & vive
Est l'ordonnance & joincture naiue.
Tant peut venir d'excellence & de pris 435
A ce qui est d'vn lieu vulgaire pris.
Ie suis d'auis que les Satyres nuz
Qui des forestz n'agueres sont venuz,
Ne semblent point estre nourriz en ville,
Ni approcher de la mode civile, 440
Vsans de vers doux & ingenieux,
De salles motz & ignomineux :
Car les seigneurs de noblesse & de bien
Sont desplaisans de cela, & combien
Qu'il peut donner plaisir auriculaire 445
A l'ignorant & rude populaire,
Eux toutesfois, qui sont plus delicatz,
N'en sont contens, & si n'en font nul cas.
Vne sillabe allongee souz mise
A vne breue, est pour Iambe prise, 450
Pié fort leger : & pour cela Trimetres
Sont appelez les Iambiques metres,
Veu qu'en vn vers six fois il redoubloit :
Par ci deuant à soi il ressembloit [p.348]
Iusqu'à la fin, mais depuis peu d'espace 455
Les fermes piez spondees, de sa grace,
Pour estre un peu plus pesant à ouir,
De son demaine il a laisse jouir :
Non pas qu'il fit vn si grand priuilege
De delaisser le second et quart siege, 460
Bien peu souvent tel est trouve es vers
Des Poëtes Acce & Enne tresexpers.
Les vers marchans de grave pesanteur
Sont reprouvez par le sçavant lecteur,
Qui blame en eux trop grande promptitude, 465
Esquelz n'appert aucun soing ni etude :
Ou il presume estre l'art ignoré,
Qui bien fort rend l'autheur deshonnoré.
Chacun n'a pas de jugement assez
Pour discerner les vers mal compassez, 470
Et a eté à noz Poëtes permise
Vne licence indigne d'etre admise :
Mais pour cela me mettrai je en hazard
D'escrire vers sans mesure & sans art?
Ou si je doi cette pensee avoir 475
Que tout un chacun mes fautes pourra voir,
Me tenant seur, & dedans l'esperance
D'vn doux pardon fondant mon asseurance.
S'ainsi je fai, coulpe j'ai euitée,
Mais je n'ai pas louange meritée. 480
De mon conseil lisez soirs & matins
Les liures Grecs & les livres Latins.
Il est bien vrai, que vos trisaieux peres
Ont fort prisé & les nombres vulgaires
Du libre Plaute, & son sel mesmement, 485
Mais toutefois & trop patiemment
Ont admiré, & que ne die
Trop sottement l'une & l'autre partie,
Si vous & moi sçauons du traict civil
Bien discerner le brocard incivil. 490
La Tragedie encor non eprouvée
Fut par Thespis premierement trouvée
Qui ses ecritz ça & la conduisoit
En chariotz, & jouer les faisoit
Par histrions, qui la face de lie 495
Couverte auoint : depuis fut abolie
Telle façon, lors que du faux visage
Le Poëte Eschile introduisit l'usage,
Aussi d'habitz plus propres et gentilz,
Lequel dressa l'eschaffaut d'ais petitz, 500 [p.349]
Et enseigne à parler hautement,
Et à user d'un stile vehement.
Apres survint la vieille Comedie,
Non sans honneur, mais licence hardie
Tomba en vice& excessif tumulte 505
Digne qui fut par Senatusconsulte
Mieux reformé, par ainsi le statut
Fut accepté, & le chore se teut,
Et i mit lon telle police & ordre,
Que plus n'i eut impunité de mordre. 510
Grand a esté des nostres l'entreprise,
Et dignes sont que beaucoup on les prise
D'avoir ose la trace abandonner
Des poëtes Graecs & en fin s'addonner
A celebrer les choses domestiques 515
En touz escritz & genres Poëtiques :
Et ne seroint les Latins plus parfaictz
En bonnes meurs & en belliqueux faitz
Qu'en beau parler & affluente veine,
N'etoit que nul ne peut prendre la peine 520
De bien limer ses escriz & d'attendre.
O vous Pisons, ne feignez de reprendre
L'euvre qui n 'est reueu et repassé
A long ennui, & souvent effacé,
Tant qu'à la fin pleine correction 525
Lui ait donné pleine perfection.
Le naturel, ce semble à Democrite,
Trop plus que l'art, de louange merite,
Et de par lui est forclu le poëte
De l'Helicon, qui est sain de la teste. 530
Et pour cela plusieurs sont paresseux
D'oster leur barbe, & leurs ongles crasseux,
En coins secretz demeurent à l'emblée
Fuient les lieux de publique assemblée :
Car celui qui pourra avoir renom, 535
Et meriter de Poëte le nom,
Qui onq sa teste (ou ne pourroit suffire
Tout l'ellebore apporté d'Anticire)
Pour guerison au barbier ne fit raire.
O moi trop fol, & à mon bien contraire, 540
Qui m'accoutume à purger mon cerveau
Melancholiq' quand vient le renouveau,
Il ne seroit tel Poëte que moi :
Mais tout cela ne m'est trop grand emoi,
Donc la façon de la queux je veux prendre, 545
Laquelle peut le couteau trenchant rendre, [p.350]
Bien qu'elle n'ait de couper l'artifice.
Rien n'ecrirai, & montrerai l'office
Et le moien pour aux biens parvenir,
Et ce qui peut un Poëte entretenir, 550
Et consommer : ce qui est convenable
Ou messeant à l'homme raisonnable,
A quelle fin peut vertu convoier,
A quelle fin peut vice devoier.
Certainement sapience hautaine 555
De bien ecrire est la source & fontaine.
Tu as Socrate & ses beaux monumens
Pour requeillir plantureux argumens,
Puis quand seront les argumens tous quis,
Sans nul refus viendront les motz exquis. 560
Qui a apris en quoi git la pitié
Deüe au païs, & la loi d'amitié,
Combien on doit les chers parens aimer,
Combien on doit frere & hoste estimer,
Quel est l'estat des conscrits Iusticiers, 565
Des avocatz, et autres officiers,
Par quel moien pourra honneur aquerre
Un capitaine enuoié a la guerre,
Celui pour vrai sçait très bien la grace bonne
Approprier a chacune personne. 570
C'est mon conseil qu'un vrai imitateur
Soit de la vie humaine spectateur,
Pour exprimer apres selon icelle
Les vives voix : car vne fable belle
En plaisanz ditz, ou les meurs de chacun 575
Gardées sont sans ornement aucun
Sans pois & art, aucunefois recree
Les ecoutans, & trop plus leur aggree
Que vers qui sont steriles et sans force,
Et motz exquis rien n'aians que l'ecorce. 580
Les poëtes grecs eurent esprit fecond,
Et un parler elegant & facond,
Car ils n'etoient point avaricieux
Sinon de gloire & de los precieux :
Noz filz de Rome apprennent à long conte 585
A calculer combien un trezor monte :
Je parle au fils d'Albin, posons le cas
Que d'un millier j'ote six cens ducatz,
Combien reste il? quatre cens : comment? certes
Bien te pourras sauver de toutes pertes : 590
J'en remetz cent, maintenant combien est ce?
Cinq cens ducatz. Or si des leur jeunesse [p.351]
Tel appetit & soing de bien avoir
Est en leur cueur imprimé, assavoir
S'ilz ecriront quelqu'euvre desormais 595
Qui puisse vivre & durer à jamais?
L'intention des Poëtes se fonde
A enseigner ou delecter le monde,
Ou à traitter matieres delectables
Et tout ensemble à vivre profitables. 600
Sois tousjours brief en ta doctrine toute,
A celle fin que celui qui l'ecoute,
La concevoir puisse facilement,
Et retenir bien & fidelement,
Tout superflu fort promptement coulé 605
De nostre sein, qui se sent trop foulé.
Les fictions pour plaisir emouvoir
De verité doivent couleur avoir
Ni requerra la fable tel credit,
Quon mette foi en tout ce qu'elle dit : 610
Et par ainsi arracher ne doit mie
Un enfant vif du corps d'une Lamie.
Le rang des vieux le poëme mesprise
Ou n'est aucune utilité comprise,
Et le propos severe & triste blesse 615
La tendre aureille aux Rhameurs de noblesse.
Celui le point a emporté sur tous,
Qui a meslé l'utile avec le doux,
En delectant & apprenant à vivre
Par un moien au Lecteur, un tel livre 620
Or & argent aux Sosies amasse,
Et en bref temps outre l'Ocean passe,
Et longue vie à l'auteur peut donner.
Mais toutesfois bien voulons pardonner
Aucuns defaux : car le son de la corde 625
Avec l'esprit & main tousjours n'accorde
Et bien souvent par epreuve voit on
Qu'au lieu d'vn bas elle rend un haut ton.
Aussi l'archer tant soit il avisé,
Tousjours ne frappe ou son oeil a visé. 630
Mais si un euvre est illustre & luisant
En mains endroiz, serai-je desplaisant
De peu d'erreurs commis par negligence,
Ou non preveuz d'humaine intelligence?
Non : comment donc? l'imprimeur coutumier 635
De recouvrer à son erreur premier,
Combien qu'on lait repris & enhorté,
Estre ne doit en son fait supporté; [p.352]
Et l'Organiste est moqué à bon droit
Qui tousiours faut dessus un mesme endroit. 640
Aussi celui qui tant d'erreurs assemble,
Et si souvent, un Cherile me semble,
Duquel me faut emerueiller & rire,
Quand deux bons vers ou trois il peut ecrire,
Et en avoir angoisse au cueur amere, 645
Toutes les fois que dort le bon Homere.
Mais on peut bien excuser & souffrir
Qu'à long labeur sommeil se viene offrir.
La Poesie à la peinture approche,
Car l'une plait quand plus on en est proche, 650
Et l'autre rend plus beau lustre de loing.
L'une demande estre veüe en un coing,
L'autre en plein iour si naive se trouve,
Que rien ne craint l'oeil subtil qui l'eprouve.
L'une fois seulement plait aux ieux, 655
L'autre plaira tousjours de bien en mieux :
Aisné Pison, bien qu'au droit droit assez duict
Tu sois du pere, & de toi mesme instruit,
Ce mot te faut en memoire avoir
Qu'en certains ars mediocre sçauoir 660
Bien est permis, quelque docteur en droit,
Ou avocat sçauant en son endroit,
Mais qui n'a pas telle grace & faconde
Que Messala, ni en sçauoir abonde
Comme Cassel, si est-il en maints lieux 665
Bien estimé, mais quoi? hommes ni dieux,
Ni haults piliers ne dispensent un homme
D'esprit moien que Poete on le nomme:
Ni plus ni moins qu'en un ioieux repas
Un rude chant sans mesure & compas, 670
Et quelque onguent que le sentir dedeigne :
Et du pavot avec miel de Sardeigne
Aux assistans fait ennui amasser,
Car le banquet s'en pouvoit bien passer.
Pareillement la nostre Poësie 675
Pour delecter les cueurs nee & choisie,
Si du plus haut quelque petit descend,
Iusqu'au plus bas decliner on la sent.
Celui qui est aux armes inhabile,
Et n'est expert de jouer à la pile, 680
Ou au sabot, ou au disque, il s'en garde
Craignant le ris du peuple qui regarde :
Et l'ignorant fait des vers : pourquoi non?
Moi qui suis noble & d'armes & de nom, [p.353]
Veu mesmement que j'ai rentes & cens, 685
Et d'aucun vice entaché ne me sens?
Rien ne diras ni feras à l'encontre
Du vrai instinct que Minerve te montre.
Tu l'entens bien, toi qui as bon esprit.
Si toutesfois un jour ta plume ecrit 690
Quelque poëme, il faut qu'il se defere
Au jugement de Mece & de mon pere
Et de moimesme, & neuf ans le presser.
Ainsi pourras ce pendant effacer
La Poësie à par toi recellée. 695
La voix ne sçait retourner escoulée,
Iadis Orphée envoié es bas lieux
Pour annoncer les mystères des Dieux,
Sceut divertir les hommes qui sans loix
D'occisions vivoient parmi les bois. 700
Pource dit on que les Tigres terribles
Il adoucit, et les Lions horribles :
Et Amphion, lequel Thebes bastit,
Si doulcement sa tortue batit,
Que par son chant les pierres assembloit, 705
Les conduisant là où bon lui sembloit.
C'etoit un fait jadis fort singulier
De separer le bien particulier
Du bien publiq, & prophane tollir
Du consacré, volupté abolir 710
Sans chois certain à tous abandonnee,
Et tant au lieu la coutume ordonnée
De mariage, edifier les villes,
Et sur le bois graver les loix civiles.
Ainsi auint qu'en honneur & renom 715
Fut illusté des Poëtes le nom.
Apres eux vint Homere non pareil,
Tirtée aussi, qui fit son appareil
D'esguilloner par heroïques carmes
Les masles cueurs aux martiaux alarmes. 720
Lors furent dictz les oracles en vers,
Et de bien vivre enseignemens divers,
Et fut par vers l'amour des Rois aquise.
Puis en avant Comedie fut mise,
Avec repos de la longue besongne, 725
Afin, au moins, que n'aies par vergongne
Le gentil son de la Muse odieux,
Et d'Apollon le chant melodieux.
On veut sçauoir si de nature ou d'art
Se fait un vers louable. de ma part 730 [p.354]
Je ne voi point que peine studieuse
Puisse servir sans veine copieuse :
Ni mesmement que copieuse veine
Puisse servir sans studieuse peine.
Tant fort est l'une à l'autre serviable, 735
L'entretenant par accord amiable.
Celui qui veut parvenir de vitesse
Au but d'honneur, il a de petitesse
Bien eu du mal, & sur la terre dure
A enduré le chaut & la froidure : 740
S'est abstenu d'infame paillardise,
S'est abstenu de vin & gourmandise.
Le menetrier aux Pythies sonant
Un jour a craint le maistre en apprenant.
Au temps present il suffit que l'on die, 745
Je fai des vers de grande melodie,
Viene la teigne au dernier en carriere,
Deshonneur m’est demeurer en arriere,
Et confesser ne sçavoir franchement
Ce que je n'ai appris aucunement. 750
Comme un crieur les acheteurs alliche
Aux biens à vendre, ainsi un Poëte riche
En patrimoine & argent usuraire
A ses presens vient les flateurs attraire,
Et s'il peut bien donner au suppliant 755
Repeue franche, & pleger le client
Vil & abject, & le mettre dehors
D'un tas d'ennuiz qu'il a par proces, lors
M'ebahirai s'il sçait juger parmi
Le faux menteur quel est le vrai ami. 760
Toi qui as fait ou veux faire plaisir
A homme aucun, garde de le choisir
Pour ecouter les vers que tu as faitz,
Car lui sentant de tes graces le fais,
C'est tresbien dit, voila bon, ce dira, 765
Comme ravi en oiant pallira,
En degoutant pleurs de l'oeil blandissant,
Et de son pié la terre ferissant :
Et comme ceux qu'on va à gages querre
Pour larmoier le defunct qu'on enterre, 770
Disent & font, & quasi se tormentent
Plus fort que ceux qui vraiement lamentent,
Ainsi plus fort s'ebahit le moqueur,
Que celui qui loue de bon cueur.
Les rois & grands font, ce dit on, livrer 775
Vin à foison, jusques a enivrer [p.355]
Celui qu'en grace ilz veulent receuoir,
Afin que mieux puissent appercevoir
A son parler s'il est d'amitié digne.
Pareillement suivant ce mesme signe, 780
Ne sois deceu en recitant tes vers
Des jugements de fallaces couvers.
Vare Quintil quand aucun lui lisoit
Quelques siens vers, corrigez, ce disoit,
Cetui passage, & celui la : & puis 785
S'il repondoit, mieux faire je ne puis
Pour tout effort, il le faisait racler :
Ce qui estoit mal limé & peu cler,
Il le faisait sur la forge remettre.
S'il aimoit mieux excuser le sien metre 790
Que l'amender, plus mot n'eut repondu,
Et estimoit que c'estoit temps perdu,
Lui permettant que sans emulateur
Fut a soimesme & à ses vers flateur.
L'homme de bien & sage blamera 795
Les vers sans art, les durs reprouvera.
A ceux qui sont mal poliz sus l'enclume,
Il croisera un trait noir de la plume,
Et de rongner il sera curieux
Les ornemens par trop ambitieux. 800
Aux lieux obscurs fera clairté ouvrir,
Et un passage ambigu decouvrir,
Il marquera ce qui est moins commode
Pour le changer, en envivant la mode
Qu'eut Aristarque, & ne dira, je n'ose 805
Mescontenter en si menue chose
Un mien ami : cette chose menue
Conduira l'homme en grand deconvenue,
Quand une fois aura esté receu.
Et au rebours de vérité receu. 810
Les plus rassis n'ont garde de toucher
Un fol Poëte, ou de lui approcher,
Non plus que d'un que la tigne meselle,
Le mal roial, ou la rage pointelle :
Mais les enfans le suivent, & s'en moquent 815
Sans i penser, & sa fureur provoquent.
Lui debavant son ouvrage admirable,
Estant deceu du juge favorable,
Si en un puis ou fosse par mal'heur
Se precipite, ainsi que l'oiseleur 820
Qui tend ses retz, combien que tousjours crie,
Secourez moi, mes amis, ie vous prie, [p.356]
Nul n'ait pourtant de lui misericorde :
Et si quelqu'un lui devalle une corde
Pour le tirer, je dirai : que sçais tu 825
Si tout à gré illec s'est abbatu
Voulant perir? & la mort ridicule
Raconterai du Poëte Sicule.
C'est qu'Empedocle aiant ce vouloir tel
Qu'on l'estimast quelque Dieu immortel, 830
Saillit au feu d'Etne ardente tout froid :
Poëtes aiant, au moins, de perir droit.
Autant il vaut l'homme faire mourir
Que maugré lui le vouloir secourir.
Par plusieurs fois un tel tour il a fait, 835
Tant que s'il fut dehors mis, en effet
Ne seroit homme, & l'ardeur curieuse
Ja n'oterait de la mort glorieuse :
Et n'appert point par quelle frenesie,
Se veut ainsi meller de Poësie, 840
S'il a pollu le tombeau paternel,
Ou un autel sacré & solennel :
Mais quoi que soit, il est tout insensé :
Et comme un Ours de courroux offensé,
S'il peut briser les barreaux qui le tienent, 845
Chasse tous ceux qui au devant lui vienent,
Pareillement le Lecteur ennuiant
Fait que chacun devant lui va fuyant,
Mais il retient celui qu'il peut atteindre
Jusques à l'ame en lisant lui eteindre, 850
Vraie sangsue imprimée à la chair,
Qui ne la veult, que bien pleine, lascher.
fin de l'Art Poetique d'Horace
Moins et Meilleur